Quels regards porter sur la politique chinoise dans le Pacifique-océanien ?

Université Paris I Panthéon Sorbonne – Chaire Grands Enjeux Stratégiques Contemporains

Christian Lechervy, Ambassadeur, Secrétaire permanent pour le Pacifique,
représentant permanent de la France auprès de la Communauté du Pacifique
et du Programme régional océanien de l’environnement.

 

La politique extérieure de la République populaire de Chine (RPC) est aujourd’hui explorée dans toutes ses cardinalités. Il n’est donc pas étonnant que les réflexions se multiplient sur ses dimensions « Pacifique ». Toutefois, il reste à savoir si la politique tournée vers les États et territoires insulaires participe d’un effort stratégique sur l’ensemble du bassin océanien et/ou si elle n’est qu’un prolongement des affirmations de puissance observées ces dernières années tout au long de la façade côtière de la RPC. Autrement dit, après avoir revendiqué une souveraineté sans partage sur les îles parsemant les mers de Chine orientale et méridionale, la Chine de Xi Jinping cherche-t-elle à s’imposer stratégiquement derrière le chapelet d’archipels qui courent du Kamchatka à l’Indonésie en passant par les Kouriles, le Japon, Okinawa, Taïwan et les Philippines ? Une question qui en suscite immédiatement bien d’autres : la RPC va-t-elle affirmer sa puissance juste derrière la première ligne de défense des États-Unis en se glissant dans son arrière-cour insulaire, celle qui s’étale de l’archipel d’Ogasawara à l’archipel Bismarck en Papouasie Nouvelle-Guinée ? La Chine communiste cherche-t-elle donc à prendre pied dans un interstice s’ouvrant vers le Pacifique Nord, à s’installer en mer des Philippines, bref à disposer d’une capacité d’action au cœur du Pacifique Sud-Ouest, en s’enkystant au Sud de l’Équateur, au plus proche de territoires américains (Marianne du Nord, Guam, voire Hawaï) ou d’États associés aux États-Unis (États fédérés de Micronésie, Palaos) ? L’ambition stratégique chinoise est-elle plus large encore en visant à long terme à contrecarrer l’influence américaine dans l’ensemble de l’« océan Oriental »,1 c’est-à-dire le théâtre stratégique s’étendant du Nord au Sud, de l’Arctique à l’Antarctique, et d’Ouest en Est, du golfe du Bengale au Triangle polynésien. Une cardinalité horizontale qui ne peut laisser indifférent jusqu’à la France puisque les deux tiers du commerce par container de la République transitent par la mer de Chine méridionale tandis que trois de ses quatre emprises territoriales dans le Pacifique sont sises le long de cet axe. Dans ce contexte, un « grand jeu » maritime Transpacifique se forge-t-il sous nos yeux ? La pax americana est-elle susceptible d’être remise en cause ? Un océan de tranquillité est-il à même de devenir un théâtre d’affrontement sino-occidental ? Autant d’interrogations sur la politique dans le Pacifique central et méridional qui sont également l’occasion d’examiner la nature et le degré de l’« expansionnisme » réel ou fantasmé de la Chine de Xi Jinping. Dans ce contexte, l’enjeu d’image n’est pas le moindre et justifie que Pékin conteste sa « dangerosité » pour l’ordre régional et international (cf. J. Yang).

Attention aux exagérations !

Pour mesurer toute la portée de l’influence prêtée à la RPC, encore faut-il ne pas oublier nombre de contraintes durables. La première est d’ordre géographique. La plupart des États et territoires du Pacifique-océanien sont à plus de 5 000 km de la Chine continentale, soit en moyenne à cinq jours de mer au minimum de la RPC. On relèvera toutefois que les territoires les plus proches (Guam,Mariannes du Nord, Palaos) sont aussi intimement et militairement liés aux États-Unis. Quant aux territoires français du Pacifique, ils sont tous à plus de huit jours des mers de Chine. La tyrannie de la distance s’impose à Pékin comme à tous les acteurs agissant ou souhaitant agir dans le Pacifique. Une contrainte lourde de conséquence si la RPC considérait qu’elle a plus à gagner à contester la suprématie militaire américaine qu’à profiter d’une coexistence pacifique.

La deuxième contrainte est, elle, diplomatique : 43 % des États souverains de la région n’ont même pas de relations diplomatiques avec Pékin mais avec Taipeh. La troisième est militaire. La marine chinoise ne possède pas dans le Pacifique-océanien le moindre point d’appui assuré. Quant aux navires de l’Armée populaire de libération, ils n’y font que des visites épisodiques vers des routes plus lointaines (ex. : Amérique du Sud). Ils n’ont d’ailleurs pas de raison stratégique à s’y aventurer régulièrement puisque la plupart des territoires océaniens ne sont pas sur les grandes routes maritimes. Quant aux axes de transport existants, ils n’ont que des liens lointains avec les « nouvelles routes de la Soie » énoncées comme prioritaires par Pékin. Mais alors même que la RPC ne dispose pas, et avant longtemps, de moyens de contester l’hyperpuissance américaine dans le Pacifique Nord et central, il n’en faut pas pour autant sous-estimer l’importance de la défense offshore du territoire dans la pensée chinoise. Les espaces insulaires sont perçus comme clés pour la sécurité nationale. L’accessibilité au Pacifique-océanien est irremplaçable, par exemple, pour la mise en œuvre depuis 1984 des expéditions scientifiques vers l’Antarctique. On peut se demander également si l’espace océanien n’est pas tout aussi important pour les programmes spatiaux civils et militaires. La Chine a donc besoin d’être présente dans le Pacifique, sous la mer, sur celle-ci et dans l’espace, ce qui impose au minimum de développer une « transit diplomacy » à l’échelle de tout le bassin. Une politique qui mobilise autant les instruments de hard que soft power.

Cependant, le soft power de la RPC doit être lui aussi relativisé. Certes, des instituts Confucius ont vu récemment le jour à l’université de Manoa (Hawaï, 2005), à l’université du Pacifique Sud (Fidji, 2011), ou encore sur le campus de l’université de la Polynésie française (2013) mais les étudiants de la région rêvent de poursuivre d’abord leur scolarité en Australie ou à Hawaï. Des écoles privées chinoises se sont également ouvertes mais leur attractivité n’est pas telle qu’elles drainent les enfants des élites de la région.

Des bourses d’études sur le continent sont également généreusement offertes pour les étudiants des pays membres du Forum des îles du Pacifique.C’est pourquoi pour souligner une emprise grandissante de la RPC, il est mis souvent en exergue les aides au développement aux États de la région. Mais leur examen détaillé montre qu’elles sont bien plus souvent guidées par des intérêts entrepreneuriaux notamment dans le secteur de la construction que par des intérêts stratégiques.

À l’échelle globale, l’aide consacrée à l’Océanie est même « modeste ». Elle ne représente que 4 % de l’effort de solidarité de la République populaire. Les concours apportés aux pays du Pacifique sont en outre trois fois moindres que ceux consacrés aux États insulaires des Caraïbes. Rapportés à ceux octroyés par la France et l’Union européenne au cours des cinq dernières années, ils n’en atteignent que 64 % de la valeur.

Sans sous-estimer l’émergence de la Chine comme nouveau donateur, ses transferts ne la classent qu’au sixième rang des contributeurs aux États et territoires océaniens après l’Australie, l’Union européenne, les États-Unis, la Nouvelle-Zélande et le Japon.

Les partenariats commerciaux doivent, eux aussi, être appréciés à leur juste valeur. Le commerce sino-océanien ne représente que 0,12 % des exportations et importations annuelles de la RPC. Certes, les échanges ont été multipliés par 7 en dix ans mais leur rythme de croissance est plus faible dans le Pacifique insulaire qu’ailleurs. Par comparaison, les échanges avec l’Afrique ont été multipliés par 15 sur la même période. La Chine n’est encore que le troisième partenaire commercial des territoires océaniens après l’Australie et l’Union européenne.

Enfin, la Chine a densifié son réseau diplomatique et sa présence institutionnelle dans la région mais cette visibilité est aussi due à la diminution des moyens américains, britanniques et allemands, à un réseau nippon atrophié3 et à une action ciblée au profit de deux pays mélanésiens (Fidji, Papouasie Nouvelle- Guinée) et deux États polynésiens (Samoa, Tonga). Néanmoins, il est maintenant généralement estimé que la RPC dispose du plus important réseau diplomatique en Océanie. Cela peut laisser à penser qu’il existe une stratégie globale pour la région mais on peine à savoir qui la pense et la coordonne.

Alors pourquoi constater tant d’inquiétudes dans la littérature stratégique occidentale face à la politique d’influence de la République populaire dans l’espace Pacifique-océanien ?

Les facteurs nourrissant l’anxiogénéité

Depuis vingt-cinq ans, le Pacifique central et méridional semblait avoir perdu toute importance stratégique. Certes dans les années 1980, on s’était inquiété des menées libyennes dans la région (au point d’endosser les coups d’États du lieutenant-colonel Sitiveni Rabuka à Fidji en 1987) ou encore soviétiques au large de Kiribati, au point de demander à la Chine d’être plus présente pour contrer Moscou mais depuis, les États insulaires semblaient surtout troublés par des crises internes (cf. le conflit de Bougainville 1989-1998, les coups d’États fidjiens de 2000 et 2006, l’état d’urgence aux Salomon en 1999, les violences intercommunautaires à Tonga en 2006). Aujourd’hui, la stabilisation politique, l’insertion des territoires océaniens dans l’espace économique asiatique ont changé la donne. Il est vrai que depuis dix ans, les dirigeants politico-administratifs de la façade occidentale du Pacifique se sont même montrés soucieux d’organiser leurs relations avec les Océaniens comme en témoigne la multiplication des Sommets Océanie + 1 (avec la Chine, la Corée, le Japon et la Thaïlande, par exemple).

Non seulement, les puissances émergentes se montrent proactives auprès des États insulaires mais les dirigeants de ces derniers répondent avec intérêt à leurs sollicitations. Ils ne cachent pas leur volonté de sortir de leurs tête-à-tête avec leurs anciennes puissances tutélaires et expriment leur volonté de bâtir une « Looking North Policy ». Celle-ci est, dans des États fragiles, parfois teintée d’intérêts patrimoniaux mais aussi de la conviction que les pays asiatiques pourraient avoir rapidement besoin des formidables ressources terrestres et sous-marines que recèlent les sous-sols insulaires même si l’exploitabilité économique, voire technique, de nombre de minéraux reste encore à démontrer.

Les intérêts croisés entre l’Asie et le Pacifique-océanien peuvent laisser croire à un déclassement stratégique des ex-puissances dominantes. Au caractère anxiogène de ce sentiment s’ajoute un double langage des acteurs.

Du côté occidental, si on se fie aux documents gouvernementaux, on accueille favorablement l’influence grandissante de la Chine dans la région. Pour reprendre l’expression d’Hillary Clinton au Sommet du Forum des îles du Pacifique en 2012 : « Dans le Pacifique, il y a de la place pour tous ». Or, les expressions diplomatiques bienveillantes et régulièrement affichées ne sont que des philosophies que l’on espère auto-réalisatrices. Elles contrastent pour le moins avec les analyses véhiculées en privé ou que l’on laisse filtrer à l’occasion des dialogues bilatéraux dits de « second track ». En outre, la politique de pivot américaine n’exclut pas la région comme en témoignent les relations militairement renforcées avec l’Australie, Guam ou encore la Nouvelle-Zélande.

Depuis 2007, il s’est fait jour l’idée que l’on assistait à un projet de grand « remplacement » asiatique (cf. R. Crocombe) pour ne pas dire chinois dans le Pacifique insulaire par l’instrumentalisation à des fins d’Hegemon de l’APD, du commerce, des investissements ou encore la protection des ressortissants.4 Cette évolution multiforme et dynamique de l’engagement chinois a généré toute une littérature, notamment aux États-Unis et en Australie, sur les risques d’une éviction occidentale tendancielle par la Chine.

Les Chinois – tout au moins certains – sont aussi responsables de cette situation de suspicion. Début 2013, un officier général chinois proclamait, par exemple, que les États-Unis seraient obligés de quitter le Pacifique sous la pression de la montée en puissance de la Chine. De tels propos entretiennent des doutes sur les objectifs de Pékin. Ils encouragent les conjectures et laisse à penser que la République populaire de Chine pourrait afficher de nouvelles ambitions au fil du temps. Les objectifs stratégiques de la Chine sont d’autant plus opaques qu’ils ne sont pas clairement énoncés. Ils ne transparaissent pas aux travers des documents officiels, par ailleurs très peu nombreux (exemple, le premier Livre blanc sur l’APD date de 2011). Ils ne sont pas proclamés par les officiels. Les visites des plus hauts dirigeants sont rares en Océanie même si Xi Jinping est déjà venu deux fois dans la région. Quant aux centres de recherches universitaires du continent, ils sont aussi peu nombreux que récents. La RPC ne compte que trois pôles universitaires consacrés au Pacifique insulaire.5

La plus grande des ambiguïtés chinoises, a trait à sa politique d’aide au développement. Ses explicatifs sont peu crédibles. L’aide apportée par Pékin serait par nature différente de celle des autres donateurs. Non seulement, elle serait non-conditionnelle, non impérialiste mais conduite d’égal à égal et entre pays en voie de développement. Toute cette axiomatique est contredite dans les faits. Ainsi, parmi les cinq principes de la coexistence pacifique figure la non-ingérence dans les affaires intérieures des États, mais celle-ci est régulièrement bafouée dans le Pacifique. Pékin comme Taipeh se sont ingérés, au moins jusqu’en 2008, dans les processus politiques intérieurs – carnet de chèque en main – pour développer des réseaux d’allégeance assurant à l’un ou à l’autre une relation diplomatique exclusive.

La persistance de la rivalité sino-taïwanaise

Au fil des années, les politiques d’influences sino-taïwanaises ont malmené les processus législatifs à Fidji, Kiribati, Nauru, les îles Salomon et au Vanuatu. Aux Salomon, cela a été jusqu’à ce que l’un soutienne Guadalcanal contre un gouvernement central bénéficiant, lui, de l’aide du rival. Il est vrai que les enjeux diplomatiques ne sont pas sans importance pour Pékin comme pour Taipeh. Les États insulaires rassemblent, tous ensemble, près de 7 % des voix à l’Assemblée générale des Nations unies. Pour Taipeh, un tiers des États ayant des relations diplomatiques avec la République de Chine se trouvent dans le Pacifique (Kiribati, Marshall, Nauru, Palaos, Salomon, Tuvalu) mais parmi ces pays, seuls Tuvalu et les Salomon n’ont jamais remis en cause leurs relations avec la Chine nationaliste depuis l’établissement de leur relation diplomatique, respectivement en 1979 et 1983. Reste à savoir si l’échec pronostiqué aux prochaines électorales du Kuomintang au premier semestre de 2016 va se traduire par la renaissance d’une concurrence sino-taiwanaise dans la région et offrir de nouveaux subsides aux acteurs locaux. Il est encore trop tôt pour le dire mais a contrario, on peut être certain que Pékin continuera de contester la place faite à Taïwan au Forum des îles du Pacifique. Les deux entités chinoises continueront également à réunir leurs affidés lors de Sommets ministériels et/ou des chefs d’États. Quelques mois à peine après que Pékin ait tenu en 2006 un forum de coopération économique et de développement Chine-Océanie, Taipeh a en effet pris soin de mettre sur pied un Sommet des États alliés du Pacifique.

La rivalité diplomatique sino-taïwanaise ne s’exprimera pas dans le Pacifique par des coopérations de défense et de livraisons d’armements. Seuls la Papouasie Nouvelle-Guinée, Fidji et Tonga disposent d’armées mais celles-ci reçoivent peu – et demandent peu – d’aides militaires, à l’exception de quelques formations, des uniformes et des armes légères. En outre, Pékin n’est pas organisé pour une action de cette nature. Pour mémoire, en dehors du Timor-Oriental aucune ambassade de Chine dans la région ne dispose d’Attaché de défense.

Pour consolider leur influence régionale, Pékin et Taipeh vont développer deux récits politiques bien différents. La République populaire va insister sur ses atouts économiques, sa contribution à la croissance des économies insulaires ; la République de Chine sur son identité austronésienne et les liens culturels ancestraux existant avec le Pacifique central (cf. les manifestations de la société taïwanaise d’études du Pacifique), sans parler de la place du christianisme dans l’île et les sociétés océaniennes.

Compter avec un rôle contesté

Bien que les récits politiques de Pékin et Taipeh divergent, les deux entités n’en vont pas moins devoir prendre en compte une image dégradée de leurs concitoyens. Celle-ci est née d’une forte croissance de l’émigration clandestine (un quart des populations installées),6 de l’installation d’une criminalité organisée d’origine continentale, de prédations de certains acteurs économiques chinois (thon) ou d’origine chinoises d’autres pays (la Malaisie dans les secteurs forestiers ; l’Indonésie, Singapour, etc.). Des situations qui sont sources de violences sur les personnes (assassinats d’hommes d’affaires en Papouasie Nouvelle-Guinée...) ou de violences collectives comme en ont déjà témoigné celles qui se sont révélées meurtrières à Naku’alofa (Tonga) et Honiara (Salomon) en 2006 puis en Papouasie Nouvelle- Guinée en 2009.

La défiance vis-à-vis des personnes s’exprime jusqu’à l’encontre des touristes.7 Elle est accentuée par les critiques portées sur certaines formes d’aide. Parmi les arguments les plus fréquemment avancés, on notera l’absence de transparence sur les actions conduites et le choix des opérateurs par le ministère chinois du Commerce, le refus de se coordonner avec les autres donateurs y compris en n’agréant pas le plan de développement du Pacifique définis par les organisations sous-régionales, la récusation des principes directeurs du Cairn Compact (2009) ou de la déclaration de Paris, le niveau d’endettement de certains États et territoires (Cook, Fidji, Samoa, Tonga), des projets sans budgets de suivi (cf. piscine d’Apia) ou encore des projets répondant avant tout à la vanité des élites ou de leurs seuls intérêts. Le plus problématique est la mise sur pied de projets de développement en économie fermée : un prêt chinois finançant des entreprises d’État du continent, mis en œuvre par une main-d’œuvre importée de Chine tout comme plus de 50 % des produits de construction. Ces mécanismes d’économie circulaire participent grandement à l’impopularité non seulement auprès des donateurs « traditionnels », des ONG mais également des populations autochtones.

Si la RPC participe à l’insertion des pays océaniens dans l’espace économique asiatique, offre de nouvelles sources de financement notamment aux projets d’infrastructures vis-à-vis desquels les donateurs « historiques » se montrent de plus en plus rétifs, ses concours font sens mais n’en sont pas moins soumis aux débats démocratiques des territoires insulaires et aux attentes d’une communauté internationale qui souhaite privilégier les efforts d’aide au développement au travers de mécanismes multilatéraux mais pas seulement bilatéraux.

Alors que la Chine a su en quelques années accroître considérablement son rôle et rehausser son profit dans le Pacifique Sud, la RPC est donc plus intéressée que jamais à la stabilité de la région à la fois pour protéger ses ressortissants, s’assurer un accès pérenne aux marchés et aux ressources énergétiques et minérales de la région (comme la Papouasie Nouvelle-Guinée). Elle est donc, avant tout, à la recherche d’une reconnaissance d’un rôle légitime dans la région et au sein des institutions océaniennes qui, jusqu’ici, ne lui ont donné que le statut de partenaire de dialogue du Forum des îles du Pacifique en 1989.

 


1 Dénomination chinoise du Pacifique (Dongyang).
2 Selon l’ambassadrice chinoise aux Samoa, au cours des cinq dernières années, la RPC a offert 2 000 bourses et 5 000 formations aux ressortissants des États insulaires.
3 Cette situation fait dire à Yongjin Zhang que la RPC est une puissance par défaut dans le Pacifique (cf. T. Wesley-Smith et E. Porter).
4 La RPC a conduit sa première opération d’extraction civilo-militaire en 2006 aux Salomon.
5 Il s’agit du centre d’études sur le Pacifique de l’université de Pékin, du centre de recherches sur les nations insulaires du Pacifique de l’université de Liaosheng et du centre des études océaniennes de l’université Sun Yat Sen à Canton. Ce dernier est le plus connu. Il est dirigé par le professeur Yu Changsen, auteur depuis le début de la décennie d’un annuaire sur l’Océanie intitulé le Livre bleu.
6 Les communautés chinoises représentent de 1 à 3 % des populations des États insulaires.
7 Palaos a pris début 2015 des mesures visant à réduire le nombre de vols charters venant de Chine pour ne pas dépendre d’un seul marché. Alors qu’en janvier 2014, la clientèle chinoise représentait 16 % des parts de marché, celles-ci s’élevaient en février 2015 à 62 %. La décision du président Tommy Remengesau visait également à prendre en compte les récriminations de son opinion publique sur l’emprise de sociétés chinoises sur l’économie locale et des comportements peu respectueux de l’environnement (comme la protection des tortues) du fait de certains clients.

ÉLÉMENTS DE BIBLIOGRAPHIE

Jian Yang : « China in the South Pacific: A Strategic Threat? », New Zealand International Review, 34(1), 2009.
Jian Yang : The Pacific Islands in China’s Grand Strategy - Small States, Big Games ; Palgrave Macmillan, New York, 2011.
Terence Wesley-Smith et Edgar Porter (ed.) : « A Regional Power by default », China in Oceania: Reshaping the Pacific ; Berghahn Books, New York, 2010.
Ron Crocombe : Asia in the Pacific Islands: Replacing the West ; ISP Publications, The University of the South Pacific, Suva, 2007.