La lutte contre la désinformation russe : contrer la propagande sans faire de contre-propagande ?

Jean-Baptiste Jeangène Vilmer
Directeur de l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire (IRSEM) *.
 

« Russia Today et Sputnik ont été des organes d’influence durant cette campagne qui ont, à plusieurs reprises, produit des contre-vérités sur ma personne et ma campagne. (…) Il était grave que des organes de presse étrangers – sous quelque influence que ce soit, je ne le sais – aient interféré en répandant des contre-vérités graves dans le cadre d’une campagne démocratique. Et à cela je ne céderai rien, rien (...) Russia Today et Sputnik ne se sont pas comportés comme des organes de presse et des journalistes, mais ils se sont comportés comme des organes d’influence, de propagande, et de propagande mensongère, ni plus, ni moins ».
Le président Emmanuel Macron, dans une conférence de presse conjointe avec le président Vladimir Poutine, le 29 mai 2017 à Versailles

Il existe de nombreuses recherches sur l’influence russe (1), mais peu sur la dés- information qui est l’un des moyens utilisés et encore moins sur les manières d’y répondre.
Dans la lutte contre la désinformation russe, qui occupe désormais de façon explicite l’Union européenne (UE), l’Otan et plusieurs États, la consigne est de contrer la propagande sans faire de contre-propagande. Elle fait consensus : le Parlement européen « rappelle qu’il est contre-productif de lutter contre la propa- gande par de la propagande et estime dès lors que l’Union dans son ensemble et ses différents États-membres ne peuvent contrer la propagande de tiers qu’en réfutant les campagnes de désinformation, et en diffusant des informations et des messages positifs » (2). Le secrétaire général de l’Otan s’en remet, lui aussi, aux journalistes « pour établir la vérité. L’Otan ne fera jamais de propagande pour contrer la pro- pagande des autres. Ce n’est pas notre façon de faire » (3). Même son de cloche dans les cabinets ministériels. La propagande est un repoussoir : elle est le discours de l’autre, comme l’idéologie est la pensée de l’autre, et il s’agit de ne pas s’y abaisser.


La consigne de ne pas faire de contre-propagande est justifiée par au moins trois raisons. D’abord, nous n’en aurions pas les moyens. Non seulement parce que Moscou consacre à son influence des ressources financières et humaines qu’aucun gouvernement européen n’est prêt à égaliser, mais surtout parce que, contrairement au temps de la guerre froide, la révolution numérique rend les contre-vérités et autres théories du complot tellement nombreuses et réactives qu’il serait impossible de les réfuter toutes. Ensuite, faire de la contre-propagande serait inefficace, parce que tout message gouvernemental est par définition partisan donc au mieux jugé peu crédible, au pire instrumentalisé par l’adversaire. Enfin et surtout, ce serait contre-productif : une réponse symétrique, par laquelle nous ferions ce que nous reprochons, serait auto-annulante. Elle saperait notre différence spécifique et notre discours fondé sur les droits de l’homme, les valeurs démocratiques et libérales, et l’état de droit. De ce point de vue, lorsqu’en mai 2017 et au nom de la contre- propagande le Président ukrainien ordonne le blocage de plusieurs sites russes dont certains parmi les plus populaires (le réseau social VK, le moteur de recherche Yandex et le service de courriel Mail.ru), il fait lui-même ce qu’il reproche à Poutine. Non seulement la mesure est inefficace, pénalisant surtout les utilisateurs ukrainiens (le manque à gagner pour les compagnies russes est faible), mais elle est contre-productive car cette censure donne l’occasion au Kremlin de faire une leçon de liberté d’expression à Kiev, ce dont il ne se prive pas. La réponse symétrique est tentante mais elle a un effet boomerang.

Comment donc lutter contre la propagande sans tomber dans la contre- propagande ? Cet article tentera de le montrer en trois parties : d’abord en défi- nissant des termes souvent employés indifféremment et qu’il ne faut pourtant pas confondre. En l’occurrence, la désinformation n’est pas exactement la même chose que la propagande. Ensuite, en rappelant ce qui est fait pour lutter contre la dés- information russe, par l’Otan, l’UE, les États et la société civile. Enfin, en envisa- geant ce qui reste à faire, sous la forme de 25 propositions.

Les termes

La propagande n’a pas toujours eu une connotation péjorative (4). Ce mot d’origine catholique (Congregatio de propaganda fide, 1622) était initialement  neutre (propagare est simplement propager, répandre). Il s’est sécularisé au moment de la Révolution française, à partir de laquelle il s’applique à la propagation des idées. En 1792, Condorcet la définit comme une « action organisée en vue de répandre une opinion ou une doctrine (surtout politique) » (5). Le mot conserve une connotation neutre, de technique utile, jusqu’à la Première Guerre mondiale. Il est résolument négatif après la Seconde Guerre mondiale. La propagande est alors irrémédiablement associée au totalitarisme. Serge Tchakhotine la décrit comme un « viol de masse » (6). En raison de cette connotation très négative, les partis politiques qui avaient tous des organes de  « propagande  » ont remplacé     le concept par celui de « communication politique » ; les États préfèrent parler d’influence ou d’information ; et les « propagandistes » sont devenus des « commu- nicants ». Depuis, l’emploi de « propagande » est quasi exclusivement critique, pour dénoncer une manipulation de l’information. C’est aussi pour cette raison que ceux qui dénoncent la propagande des autres n’assument pas, en général, de faire de la contre-propagande.

Définie comme « une tentative d’influencer l’opinion et la conduite de      la société de telle sorte que les personnes adoptent une opinion et une conduite déterminée » (7), ou encore la « manipulation psychologique d’une population dans l’objectif de l’influencer ou de l’embrigader » (8), elle se distingue de la désinfor- mation.

Mot d’origine soviétique (dezinformatzia), forgé dans les années 1920 pour dénoncer les opérations dont l’URSS s’estimait victime, la désinformation s’est fait connaître durant la guerre froide. Elle peut être définie comme « une technique de manipulation de l’opinion publique par la diffusion d’informations fausses, véri- diques mais tronquées ou véridiques avec l’ajout de compléments faux » (9). Elle implique donc une falsification (de faux témoignages ou de fausses images, par exemple), une intention de tromper et une médiatisation. Les deux – désinforma- tion et propagande – ont le même objectif (la manipulation de l’opinion publique) et font d’ailleurs partie des mesures actives (aktivni meroprijatija), au même titre   que la compromission ou la contrefaçon par exemple, mais la désinformation a la spécificité d’employer à cette fin des informations délibérément fausses ou inexactes.

En l’occurrence, la désinformation portée par les médias du Kremlin, dont les plus influents sont RT et Sputnik, consiste notamment à inventer des faits (le viol col- lectif d’une jeune Allemande d’origine russe par des migrants, pour fragiliser Angela Merkel) ; à fabriquer la réalité (faire venir des néonazis russes en Estonie, les faire pas- ser pour des activistes locaux et les filmer déployant des symboles nazis lors d’événe- ments estoniens, pour en déduire que le pays est gangrené par l’extrémisme) (10) ou des preuves (des images satellitaires photoshopées censées prouver que le vol MH17 avait été abattu par un missile ukrainien) ; ou encore à inverser des propos (lorsqu’un blogueur estime que le gouvernement syrien est responsable de l’attaque chimique d’août 2013, RT le cite comme affirmant la responsabilité des rebelles) ou des actions (RT présente des images de la manifestation du 29 octobre 2016 à Rome en faveur de la réforme constitutionnelle comme étant celles des opposants).


La désinformation ne doit pas être confondue avec la diplomatie publique – un terme développé dans les années 1960 aux États-Unis pour décrire les activi- tés de la US Information Agency (USIA, 1953-1999). La diplomatie publique est « un processus par lequel un gouvernement communique directement avec une population étrangère pour promouvoir ses valeurs et ses intérêts et, in fine, pour conditionner l’agenda de ses dirigeants politiques » (11). Elle n’est pas en soi pro- blématique – tous les États qui en ont les moyens déploient une diplomatie publique – et cela permet de répondre à l’argument commun selon lequel RT et Sputnik, par exemple, ne sont que les équivalents russes des grands médias occi- dentaux. Leur rédactrice en chef répète que « Nous ne donnons pas le point de vue du Kremlin mais celui de la Russie, comme France 24 ou la BBC, qui montrent les valeurs de la France et de la Grande-Bretagne ou Al-Jazeera pour le monde arabe » (12). Or, ce qui est reproché à RT et Sputnik n’est pas de faire de la diplomatie publique, mais de le faire en utilisant la désinformation, ce qui n’est pas la même chose.
 

Ce qui est fait

Ces dernières années, l’Otan, l’UE, plusieurs États et la société civile ont mis en place des mécanismes de lutte contre la désinformation russe. Ce sont « les premiers signes d’une réponse auto-immune » (13).
Premièrement, l’Otan a depuis 2014 un centre d’excellence pour la commu- nication stratégique (StratCom) situé à Riga, en Lettonie. Son expertise est généra- liste, il travaille notamment sur les doctrines, les opérations et la formation mais, compte tenu de son implantation, il s’intéresse particulièrement à la désinforma- tion russe. L’Alliance a également sur son site internet une page dédiée à la réfuta- tion des accusations de la Russie à son égard, qualifiées de « mythes » (14), sur le mode de la correction (une longue liste d’« allégations » systématiquement suivies d’une réponse commençant par « Dans les faits… »). La Division Diplomatie Publique (PDD) en diffuse une version abrégée sous la forme d’une fiche d’infor- mation sur « Les cinq principaux mythes entretenus par la Russie au sujet de l’Otan » (15). Par ailleurs, l’Alliance a également le souci d’objectiver le débat, en publiant des preuves (notamment des photos satellitaires montrant l’implication de la Russie en Ukraine).

Deuxièmement, l’UE dispose depuis 2015 d’une « task force de communi- cation stratégique orientée vers le voisinage oriental » (East StratCom Task Force) établie au sein du Service européen pour l’action extérieure (SEAE). Faisant suite à une décision du Conseil européen les 19-20 mars 2015, cette cellule est opéra- tionnelle depuis le 1er septembre de la même année. Dirigée par un diplomate bri- tannique, Giles Portman, elle a trois missions : la promotion des valeurs et des poli- tiques de l’UE ; le renforcement de l’environnement médiatique dans les pays du voisinage oriental ; et l’anticipation, le traitement et la réponse à la désinformation
« des États tiers ». Ses promoteurs prennent soin de préciser qu’« il ne s’agit pas de faire de la contre-propagande » (16). Son travail est diffusé sur son site internet « EU vs Disinformation » (euvsdisinfo.eu), dans une Disinformation Review hebdomadaire et sur les réseaux sociaux sous le nom de « briseurs de mythes » (EU Mythbusters). Son slogan est « Don’t be deceived: question even more », en référence au slogan de RT (« Question More »). Sa page en russe serait assez fréquentée car elle concentre à elle seule le quart du trafic du site du SEAE (17). Depuis sa création, elle aurait recensé plus de 2 500 cas, en 18 langues, de désinformation, c’est-à-dire d’« histoires contredisant des faits publiquement disponibles » (18).

En dépit de ces résultats, cette task force manque de moyens humains et financiers. Composée de seulement onze personnes, elle n’existe et ne survit que grâce à la volonté d’une poignée d’États-membres, qui la financent et lui prêtent du personnel. Les institutions européennes ne semblent pas très investies, et il est régulièrement reproché à Federica Mogherini de ne pas prendre la menace de la désinformation russe au sérieux. Ces difficultés témoignent de la désunion euro- péenne sur la question. Les 28 ayant des relations différentes avec la Russie, ils n’accordent pas tous la même importance au problème de la désinformation russe. Les pays baltes sont ultra-conscients de leur vulnérabilité, due à la proximité géogra- phique, aux liens historiques et à la présence d’importantes communautés russo- phones (37 % des Lettons par exemple). Ils sont donc à la pointe de la lutte contre l’influence russe, suivis par la Scandinavie, l’Europe centrale et, pour des raisons dif- férentes, le Royaume-Uni. À l’autre bout du spectre, des États lointains et plus pré- occupés par le flanc Sud (Italie, Grèce, Chypre) sous-estiment le problème et défen- dent même un rapprochement avec Moscou (levée des sanctions au nom des intérêts économiques). Comme sur d’autres sujets, l’Europe est donc divisée en matière de lutte contre la désinformation russe, ce qui affaiblit les initiatives communes.

Troisièmement, il y a aussi et parallèlement de plus en plus d’initiatives nationales. Sans ordre particulier ni prétention à l’exhaustivité, on peut citer les exemples suivants. La Finlande vient de créer un centre d’excellence pour la lutte contre les menaces hybrides, rattaché au Premier ministre, en partenariat avec l’UE et l’Otan (la France fait partie des neuf États fondateurs). Son éventail est plus large car la désinformation n’est que l’une des mesures de la guerre dite « hybride ». Il sera a priori de taille réduite (cinq personnes, avec un budget de 750 000 
pour le reste de l’année 2017 et 1,5 million par an à compter de 2018).

En Suède, l’agence civile de gestion de crise (MSB) avait annoncé en octobre 2015 la création en son sein d’une cellule de « défense psychologique » consacrée à la lutte contre la désinformation, mais elle tarde à se mettre en place et rien n’indique qu’elle sera bien financée. Stockholm craignant des campagnes de déstabilisation en vue de ses élections de 2018, l’Agence pour la gestion publique (Statskontoret) a été chargée, début 2017, de faire des propositions pour une
« défense psychologique moderne ». Et les Suédois sont de bons contributeurs aux initiatives régionales : membres du centre de StratCom de l’Otan depuis janvier 2017, alors même que la Suède est un pays non-aligné, ils ont aussi un diplomate dans la task force européenne et devraient participer au centre d’Helsinki.

La République tchèque considère également que son environnement infor- mationnel est vulnérable : elle recense une quarantaine de sites conspirationnistes et pro-russes en tchèque, et observe un nombre disproportionné de « diplomates » russes dans le pays (entre 130 et 150, le double de l’effectif américain). En pré- vention des attaques qui pourraient viser ses prochaines élections (législatives en octobre 2017 et présidentielles en janvier 2018), Prague a mis en place un centre contre les menaces terroristes et hybrides, d’une vingtaine de personnes, au sein du ministère de l’Intérieur, opérationnel depuis janvier 2017.

La Slovaquie pourrait lui emboîter le pas, car le parallèle entre les deux pays est fréquent (le site konspiratori.sk recense des dizaines de sites conspirationnistes slovaques et tchèques) et, dans son discours du 16 mars 2017, le Président slovaque s’est ému de l’inaction de son pays contre la menace de la désinformation russe, alors que la presse rappelait l’initiative tchèque.

Les Allemands s’attendent à être les prochains sur la liste, en vue de leurs élections de septembre 2017. Les moyens du Kremlin pour affaiblir Merkel sont multiples (19) : de fausses histoires impliquant des migrants, censées montrer sa fai- blesse ; des révélations tirées de ses communications privées (courriels et téléphone) ; des agitations publiques via le réseau des Russes vivant en Allemagne ; ou encore le renforcement de l’extrême-droite pour montrer que le pays, à l’image de l’Europe, est gangrené par les « néonazis ». Les médias ont rapporté que le ministère de l’Intérieur avait proposé la création d’un centre de défense contre la désinforma- tion, mais le porte-parole dudit ministère a ensuite démenti, expliquant ne pas avoir l’intention de créer ce qui pourrait s’apparenter à un « ministère de la vérité ». Cette réticence illustre l’inconfort dans lequel la lutte contre la désinformation place les démocraties libérales, et la difficulté à faire comprendre qu’elle n’est pas de la pro- pagande. Ceux qui renoncent, par peur de l’amalgame et souci de leur image, à se doter des outils nécessaires pourraient le regretter lorsqu’ils seront démunis face à des attaques toujours plus sophistiquées et volumineuses.

Les Américains aussi ont pris conscience de leur vulnérabilité, avec l’affaire dite des « DNC Leaks », des fuites de courriels au comité national démocrate pen- dant la campagne présidentielle de 2016. Ils observent également que RT est désormais la deuxième chaîne d’information étrangère la plus regardée dans le pays. Le Congrès américain a donc récemment élargi le périmètre du Global Engagement Center (GEC), créé en mars 2016 au sein du Département d’État pour lutter contre la propagande étrangère, initialement d’origine non-étatique (comprendre : jihadiste), et désormais aussi d’origine étatique (comprendre : essen- tiellement russe). Il a un budget de 16 millions de dollars pour 2017 (20).
Dans ce paysage, la France est plutôt discrète. Une étude récente du think tank tchèque European Values la classe parmi les États « peu concernés », voire réti- cents à s’impliquer (21). Par comparaison, le Royaume-Uni et l’Allemagne font par- tie, avec les États baltes, les Scandinaves et quelques États d’Europe centrale, de ceux qui non seulement sont conscients du problème mais participent activement à la réponse. La France est décrite comme donnant la priorité à la lutte contre la propagande islamiste (car à la lutte contre le terrorisme), et négligeant, par la même occasion, la menace que représentent l’influence et la désinformation russes.

Cela s’explique à la fois par la tendance politique à faire primer le court terme sur le long terme, et par le fait qu’une partie importante de la population ne voit pas le problème. Il existe en France un courant pro-russe, qui va de l’extrême- gauche à l’extrême-droite, et défend un rapprochement avec Moscou et un éloi- gnement corollaire de l’UE et de l’Otan. Trois des quatre candidats sérieux à l’élec- tion présidentielle – la finaliste Marine Le Pen (21,3 % au premier tour), François Fillon (20 %) et Jean-Luc Mélenchon (19,5 %) – représentant à eux seuls la majo- rité de la population, ont d’ailleurs réclamé la levée des sanctions contre la Russie. Au moins deux d’entre eux ont justifié l’annexion de la Crimée et un a même béné- ficié d’un financement russe. Olivier Schmitt dissèque les arguments sur lesquels repose cette « passion française » : Poutine serait un « vrai » dirigeant, nos valeurs seraient proches, un rapprochement serait dans notre intérêt, et les Russes ne seraient pas pires que les Américains (22).

Le candidat Emmanuel Macron, dont l’engagement européen était évident, n’avait pas hésité à critiquer le régime de Poutine durant la campagne et, ce qui n’est pas un hasard, il a été le seul à subir des cyberattaques massives attribuées aux Russes. Pour ces deux raisons, on pouvait s’attendre à ce qu’il soit particulièrement vigilant aux risques de la guerre informationnelle. Élu président, il l’a déjà montré, n’hési- tant pas à déclarer devant son homologue russe, lors d’une conférence de presse conjointe à Versailles le 29 mai 2017, que « Russia Today et Sputnik ne se sont pas comportés comme des organes de presse et des journalistes, mais ils se sont comportés comme des organes d’influence, de propagande, et de propagande men- songère », promettant « ne rien céder » sur ce sujet.

Quatrièmement, la société civile est aussi mobilisée, et est souvent la plus réactive. Le site stopfake.org, créé par l’école de journalisme de l’Académie Mohyla de Kiev, s’est fait connaître pendant l’affaire criméenne. Le programme Kremlin Watch du think tank tchèque European Values, lancé en 2015 par Jakub Janda, est particulièrement actif. La guerre aux fausses informations déborde largement le cas russe et a été accélérée par la montée des populismes et de leurs mensonges durant les campagnes pour le Brexit et pour Donald Trump. Les « fact-checkeurs » se sont donc multipliés ces derniers temps, le plus souvent au sein des médias eux-mêmes. Qu’un média juge ses confrères – comme le Décodex du Monde qui depuis février 2017 évalue la fiabilité de centaines de sites d’information – suscite généralement des accusations d’être à la fois « juge et partie ». RT s’en donne alors à cœur joie, publiant des captures d’écran de comptes Twitter comparant Le Monde à la Pravda soviétique ou à 1984 d’Orwell. Des initiatives collectives, comme le projet First Draft réunissant de nombreuses rédactions en France et à l’étranger dans le but d’amé- liorer la qualité du journalisme en ligne, et son outil de vérification CrossCheck, sont moins vulnérables à la critique.

S’estimant visée par les « fact-checkeurs », RT a répliqué en lançant sa pla- teforme FakeCheck, qui utilise une apparence de vérification (en réalité basée non sur des faits mais sur des allégations ou dénégations supplémentaires) pour répondre aux mises en cause. « L’équipe de RT est passée maître dans l’art de retourner les accusations de propagande à son avantage. Elles lui permettent de renforcer son identité de média “antisystème” et de canaliser les audiences contes- tataires en jouant la carte du “seul contre tous” » (23).


Ce qui reste à faire

Sans ordre particulier ni prétention à l’exhaustivité, voici 25 propositions pour lutter plus efficacement contre la désinformation russe.
1.    Commencer par définir et distinguer clairement les termes – désinfor- mation, propagande et diplomatie publique en particulier – pour lutter contre le relativisme répandu consistant à dire que « tout est propagande » et que tous les médias pratiquent la désinformation. Ce qu’il faut condamner n’est pas la défense des
intérêts nationaux – les médias russes ont le droit de défendre un point de vue russe, et même celui du régime – mais la falsification intentionnelle de l’information.
2.    Ne pas faire preuve de russophobie, ne pas tomber dans le piège consis- tant à jouer le rôle que les Russes nous attribuent. Diaboliser Poutine ou la Russie est contre-productif, car alimente le narratif russe (« la stratégie de survie de Poutine repose sur la preuve de l’hostilité occidentale pour justifier une politique de containment ») (24). L’ennemi est la désinformation, qui n’est pas un problème spécifiquement russe, mais qui concerne de nombreux acteurs étatiques et non- étatiques, y compris au cœur même de nos démocraties occidentales.
3.    Reconnaître publiquement l’importance du sujet. Le Parlement européen
« est préoccupé par le fait que certains États-membres sont peu conscients de consti- tuer des publics et des espaces de propagande et de désinformation » et il insiste sur
« la nécessité de favoriser la sensibilisation » (25). Reconnaître que la désinformation russe existe et menace la sécurité de plusieurs États européens, et même de l’Europe dans ses institutions et son idéal, est une condition sine qua non de toute réponse.
4.    Prendre conscience du continuum entre actions militaires et guerre infor- mationnelle. Notre vulnérabilité est aussi liée au fait que nous cloisonnons les sujets. Contrairement aux Occidentaux qui ont une définition relativement  étroite de la guerre, et qui donc éprouvent quelques difficultés à répondre à des actions psychologiques qui n’en  relèvent pas stricto sensu, les Russes pratiquent le continuum   et érigent même l’ambiguïté en doctrine. En 2010, le contre-amiral Vladimir Pirumov, alors en charge de la guerre électronique, a défini la guerre information- nelle comme ayant lieu « en temps de guerre comme de paix » (26). Elle consiste comme son nom l’indique à utiliser l’information comme arme de guerre, à influencer l’adversaire par des moyens divers, dont la désinformation (d’autres sont la propagande, la démoralisation, le lobbying, le chantage, etc.). Les Occidentaux ont une vision compartimentée du champ informationnel, distinguant la cybersé- curité – souvent réduite au risque de cyberattaques sur des infrastructures critiques – des actions menées dans le domaine médiatique, alors que les Russes ont une vision globale liant cyberopérations, communication politique, désinformation, déstabi- lisation d’élections, etc.
5.    Mieux comprendre la désinformation russe en renforçant les recherches sur le sujet, dans les ministères, à l’université, dans les think tanks, les organes de presse, etc. Il ne s’agit pas de ressusciter la soviétologie, mais de se rendre à l’évi- dence qu’on ne peut répondre adéquatement qu’à ce que l’on connaît bien. Une littérature sur l’influence russe se développe déjà, il faut poursuivre et en diffuser les conclusions le plus largement possible, dans une variété de formats, du livre scientifique au tweet.
6.    Reconnaître les limites d’une réponse purement gouvernementale (ce qui vaut aussi pour la lutte contre la radicalisation), qui sera toujours suspecte d’être biaisée et elle-même propagandiste. La réponse doit être globale, et venir aussi du secteur privé et de la société civile. Cela fait longtemps qu’on le sait : dans une conférence de 1952 sur la contre-propagande, le chef de l’Information Research Department, une section secrète du Foreign Office britannique qui a eu jusqu’à 300 personnes chargées de combattre l’influence soviétique au Royaume- Uni, déclarait déjà : « Nous devons dissiper toute idée que les problèmes fonda- mentaux et les actions qui en découlent ne relèvent que des gouvernements et des organismes contrôlés par eux. L’information parrainée par le gouvernement, les prospectus tendancieux, les déclarations officielles et toutes les tentatives évidentes d’influencer les opinions libres sont pires qu’inutiles, ou devraient l’être » (27). Il faut donc promouvoir les initiatives de la société civile, ONG de défense des jour- nalistes dans le monde, plateformes de « fact-checking », etc.
7.    Reconnaître les limites de la réfutation. Rétablir la vérité est certes néces- saire mais insuffisant, surtout si l’objectif de la propagande russe n’est plus de pro- mouvoir un modèle alternatif mais de « saper la notion de vérité objective et la pos- sibilité même de faire du journalisme » (28). La rédactrice en chef de l’agence gou- vernementale Rossiya Segodnya et ancienne directrice de RT l’assume : « Il n’y a pas d’objectivité, seulement des approximations de la vérité par autant de voix dif- férentes que possible » (29). Le général Nikolay Bordyuzha, secrétaire général de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), a même déclaré que « dans la guerre informationnelle, le côté qui dit la vérité perd » (30). D’où l’utilité seule- ment relative des réponses à la désinformation basées sur la réfutation ou le réta- blissement de « la vérité ». Tout en ayant conscience de ces limites, il faut réfuter, ne serait-ce que pour opposer une résistance et convaincre ceux qui peuvent l’être par l’argumentation rationnelle. Seulement, pour être efficace la réfutation doit (i) venir rapidement (la réactivité est essentielle car la saturation quotidienne fait    que les gens oublient très vite, et la fausseté, comme la tache, se nettoie mieux lorsqu’elle n’a pas eu le temps de s’imprégner) ; (ii) avec insistance (c’est la vertu de  la répétition) ; (iii) et tout en produisant une version alternative (c’est-à-dire en rem- plaçant les éléments faux, pour ne pas laisser un vide donc de l’incompréhension) (31).
8.    Former le grand public, dès le plus jeune âge, à l’éducation à l’image et aux médias audiovisuels, à la pensée critique et à l’argumentation rationnelle. La dés- information ne fonctionne que grâce à la crédulité du public. Vérifier la fiabilité des informations peut s’apprendre, comme reconnaître les manipulations et les rai- sonnements fallacieux (32).
9.    Promouvoir une charte d’éthique journalistique largement partagée et signée par des médias de tous bords et de tous pays, et des blogueurs du monde entier. La charte définirait et dénoncerait la désinformation. Si elle est largement acceptée, elle contribuera à marginaliser les désinformateurs.
10.    Adapter la réponse à l’auditoire. On ne répond pas à du divertissant avec de l’ennuyeux. La plupart de ceux qui sont convaincus par la désinformation russe baignent dans l’information spectacle (infotainment). L’une des raisons de la popularité de RT est d’ailleurs dans cette alternance, voire confusion, entre l’infor- mation et le divertissement. Ceux qui ne peuvent digérer qu’une information divertissante ne seront pas convaincus par une réfutation rationnelle, une fiche en cinq points, sur le mode « corrections de la maîtresse ». Il faut donc varier les formes de la réponse, pour s’adapter à différents auditoires, et en faire un sujet populaire, non réservé à un auditoire de geeks sur les réseaux sociaux, ou d’initiés lisant des rapports, mais digne de la télévision à une heure de grande écoute.
11.    Encourager le développement de médias russophones indépendants, ni étatiques ni financés par des organisations identifiées comme partisanes.
12.    Traduire et promouvoir les articles des journalistes russophones indé- pendants, à la manière de Courrier International, non seulement parce qu’ils méri- tent d’être encouragés, mais aussi car contrer RT et Sputnik sera plus efficace en montrant qu’il existe d’autres discours russes, qu’en y opposant un contre-discours occidental. Le risque est toutefois que cette mise en valeur internationale des jour- nalistes qui font preuve en Russie d’une plus grande liberté de ton finisse par menacer leur sécurité.
13.    Inviter les plus prometteurs de ces journalistes indépendants dans le cadre d’un programme du type Programme d’invitation des personnalités d’avenir (Quai d’Orsay), Programme d’invitation des journalistes étrangers (Quai d’Orsay) ou Personnalités Avenir Défense (Armées).
14.    Valoriser les témoignages d’anciens de la désinformation russe (officiels, journalistes ou trolleurs) qui, comme on le fait avec les « revenants » déçus du jiha- disme, peuvent exposer les méthodes et les mythes.
15.    Utiliser la technologie disponible et encourager la recherche sur l’auto- matisation du fact-checking et de l’identification des trolls. Dans le même registre, voir avec les réseaux sociaux, en premier lieu Facebook et Twitter, si les outils qu’ils utilisent pour lutter contre la radicalisation, qu’elle soit d’extrême-droite ou jiha- diste, pourraient être utilisés dans la lutte contre la désinformation.
16.    Renforcer la task force européenne en lui fournissant suffisamment de fonds et de personnel, et mieux diffuser ses productions. Le Parlement européen demande à chaque État-membre de transmettre largement le bulletin hebdoma- daire « afin de sensibiliser le grand public » (33).
17.    Inciter les États européens à développer des mécanismes nationaux de lutte contre la désinformation. Certains ont déjà commencé à le faire, surtout les plus exposés (pays baltes, Scandinavie, Europe centrale), mais d’autres se croient à l’abri ou peu concernés. Avoir une cellule nationale de lutte contre la désinforma- tion a plusieurs avantages. D’abord, elle permet de réagir plus rapidement. C’est l’un des enseignements de l’affaire Lisa en Allemagne : la fausse nouvelle a pu se propager et déclencher des manifestations car le gouvernement allemand n’a pas été capable de la réfuter assez rapidement, en l’absence d’une équipe préparée à ce genre de menace (34). À titre préventif, cette cellule peut aussi s’appuyer sur le réseau diplomatique pour surveiller les activités de propagande à l’étranger et alimenter les circuits européens et otaniens ; et diffuser un bulletin hebdomadaire sur le modèle de celui de la task force européenne. En cas d’urgence, c’est-à-dire de menace au potentiel déstabilisateur, elle pourrait aussi diffuser une alerte massive, similaire au dispositif « Alerte enlèvement » mis en place en France, avertissant la popula- tion qu’une fausse information circule.
18.    Renforcer la coopération entre les États, l’UE et l’Otan dans ce domaine, en prenant garde au risque de duplication entre les divers centres et autres initia- tives qui se développent. De ce point de vue, l’intérêt du centre d’Helsinki est sur- tout d’être une plateforme d’échange entre l’UE et l’Otan.
19.    À chaque fausse information, non seulement corriger le contenu mais exposer la méthode employée, qui est en réalité plus dangereuse car susceptible de produire une infinité d’autres fausses informations. Mettre systématiquement en évidence de façon pédagogique les moyens de la manipulation, pour familiariser le public avec les méthodes de la désinformation et lui permettre de les détecter ailleurs.
20.    Remonter le fil des financements. Le Parlement européen « demande aux institutions et aux autorités compétentes de l’Union de suivre efficacement les sources de financement de la propagande antieuropéenne » (35).
21.    Créer une ONG internationale dédiée à la lutte contre la désinforma- tion et qui, sur le modèle de ce que font RSF, Transparency International et Freedom House par exemple, établirait un classement des médias. Les initiatives existantes, conduites par les organes de presse eux-mêmes, prêtent le flanc à la critique pour être à la fois juges et parties. Cette ONG devra pour être crédible ne pas être liée aux médias qu’elle évalue et ne pas être considérée comme « occidentale ».
22.    Envisager le cas échéant des contre-mesures plus contraignantes telles que des amendes, des sanctions, voire le blocage de certains médias. Ceux visés et leurs soutiens ne manqueront pas de hurler à la censure et de faire de vibrants plai- doyers en faveur de la liberté d’expression. Rappeler alors que cette liberté n’est pas absolue, mais soumise aux limites prévues par le droit international (art. 20 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, art. 10 de la Convention européenne des droits de l’homme). Le Parlement européen « souligne que l’incita- tion à la haine, à la violence ou à la guerre ne peut pas se cacher derrière la liberté d’expression ; [et] encourage les initiatives juridiques dans ce domaine destinées à accroître la responsabilité lors du traitement de la désinformation » (36).
23.    Contrer non seulement la désinformation mais aussi son intention et ses effets potentiels, en renforçant ce qu’elle cherche à affaiblir : la solidarité euro- péenne et otanienne, la cohésion sociale, la démocratie, les droits de l’homme, l’esprit critique, la transparence, la résilience, etc. Cela peut être contre-intuitif car il est tentant, dans la lutte contre la désinformation comme dans celle contre le ter- rorisme, de violer temporairement les valeurs que l’on prétend protéger, au nom de l’efficacité. Mais c’est aussi contre-productif, et permet de nourrir le discours adverse. C’est par le renforcement de ces attributs démocratiques que l’on pourra continuer à incarner pour les populations russes un modèle alternatif.
24.    Communiquer davantage en russe, notamment sur les réseaux sociaux.
25.    Assumer et défendre les valeurs européennes, développer un discours positif : « L’Union est une réussite en matière d’intégration qui continue, malgré la crise, à attirer des pays désireux de reproduire son modèle et de l’intégrer ; (…) l’Union doit mettre en avant un message positif axé sur ses succès, ses valeurs et ses principes, obtenus avec détermination et courage, et doit tenir un discours offen- sif et non défensif » (37).


* L’auteur s’exprime en son nom propre et ses propos n’engagent pas le ministère des Armées.
(1)    En français, voir notamment Cécile Vaissié : Les Réseaux du Kremlin en France, Paris, Les petits matins, 2016 ; Nicolas Hénin : La France russe, Paris, Fayard, 2016 ; Olivier Schmitt : Pourquoi Poutine est notre allié ? Anatomie d’une passion française, Lille, Hikari, 2016 ; Céline Marangé : Les stratégies et les pratiques d’influence de la Russie, Étude de l’IRSEM,    n° 49, mars 2017.
(2)    Parlement européen, résolution du 23 novembre 2016, P8_TA(2016)0441.
(3)    Jens Stoltenberg cité dans Thomas Wieder et Sylvie Kauffmann : « L’Otan ne veut pas de nouvelle guerre froide », LeMonde.fr, 18 février 2017.
(4)    Sur l’histoire du mot, voir Fabrice d’Almeida : « Propagande, histoire d’un mot disgracié », Mots. Les langages du politique, 69, juin 2002, p. 137-148.
(5)    Condorcet : « Lettre à de Pange », cité dans Trésor de la langue française, Paris, Gallimard, 1988, t. 13, p. 1323.
(6)    Serge Tchakhotine : Le viol des foules par la propagande politique ; Paris, Gallimard, 1952 [ouvrage terminé en 1939].
(7)    Jean-Marie Domenach : La propagande politique ; Paris, PUF, 1965, p. 8.
(8)    Stéphane François : « Désinformation », Publictionnaire, 7 novembre 2016, en ligne.
(9)    Ibidem.
(10)    Kaitsepolitseiamet (service de sécurité intérieure estonien), Annual Review 2016, p. 8.
(11)    Maxime Audinet et Kevin Limonier : « La stratégie d’influence informationnelle et numérique de la Russie en Europe », Hérodote, 164, 2017, p. 126.
(12)    Margarita Simonian, alors rédactrice en chef de Russia Today et Sputnik, citée par Isabelle Mandraud : « Les médias, machine de guerre du Kremlin », Le Monde, 25 novembre 2015, p. 2.
(13)    Jakub Janda : « Why the West  is Failing to Counter Kremlin Disinformation Campaigns », The Observer,        30 décembre 2016.
(14)    « Relations Otan-Russie : les faits », NATO, 17 mai 2017 (www.nato.int/).
(15)    « Les cinq principaux mythes entretenus par la Russie au sujet de l’Otan », NATO, décembre 2015 (www.nato.int/).
(16)    « L’UE crée une équipe pour contrer la propagande russe », Le JDD, 31 août 2015.
(17)    Philippe Régnier : « Tacler la désinfo russe », Le Soir, 24 novembre 2016, p. 12.
(18)    « Cybermenaces et désinformation : les pays occidentaux se mobilisent », AFP, 16 février 2017.
(19)    Jakub Janda : « Russian Spooks Will Target Angela Merkel Next », The Observer, 16 décembre 2016.
(20)    Bruce Wharton : Remarks at Workshop on « Public Diplomacy in a Post-Truth Society », Hoover Institution, Stanford University, 20 mars 2017 (www.state.gov/).
(21)    European Values, Kremlin Watch Report, Overview of countermeasures by the EU28 to the Kremlin’s subversion opera- tions, 16 mai 2017.
(22)    Olivier Schmitt : Pourquoi Poutine est notre allié ?, op. cit.
(23)    Maxime Audinet : « La voix de Moscou trouble le concert de l’information internationale », Le Monde diplomatique, 1er avril 2017, p. 7.
(24)    Lilia Shevtsova : « Putinalia as Deceit and Self-Deceit », The American Interest, 17 novembre 2016.
(25)    Parlement européen, résolution du 23 novembre 2016, op. cit.
(26)    Vladimir S. Pirumov : Informatsionnoe Protivoborstvo, Moscou, 2010.
(27)    « Counter-Propaganda: A Basic Analysis », TNA FCO 141/7460 (www.psywar.org/).
(28)    Keir Giles, cité par Frédéric Koller : « Désinformation : l’offensive russe », Le Temps, 28 décembre 2016, p. 3.
(29)    Margarita Simonyan : « The West never got over cold war stereotype », Der Spiegel, 13 août 2013.
(30)    Nikolay Bordyuzha : Moscow Conference on International Security 2014: The Plenary Speeches and Panels’, Valdai Club, 6 juin 2014, cité dans Keir Giles, Russia’s ‘New’ Tools for Confronting the West: Continuity and Innovation in Moscow’s Exercice of Power, Chatham House, mars 2016, p. 27.
(31)    Christopher Paul et Miriam Matthews : The Russian “Firehose of Falsehood” Propaganda Model, RAND, 2016, p. 9.
(32)    Les cours de pensée critique sont fréquents dans les universités anglo-saxonnes – j’ai moi-même enseigné l’argu- mentation rationnelle à l’Université de Montréal – et servent utilement de propédeutique aux études. Voir notamment Normand Baillargeon : Petit cours d’autodéfense intellectuelle ; Montréal, Lux, 2005.
(33)    Parlement européen, résolution du 23 novembre 2016, op. cit.
(34)    Jakub Janda : « The Lisa Case: STRATCOM Lessons for European states », Federal Academy for Security Policy, Working Paper No. 11/2016.
(35)    Parlement européen, résolution du 23 novembre 2016, op. cit.
(36)    Ibidem.
(37)    Ibid.